Des plantes portées par le vol des oiseaux

Publié par Bourgogne-Franche-Comté Nature, le 15 février 2024   510

Enracinées, les plantes terrestres doivent tout de même se déplacer pour leur pollinisation et la dissémination de nouveaux individus. Elles font donc appel à des transporteurs naturels : l’air, l’eau, ou les animaux… comme les oiseaux !

Qu’est-ce que l’endozoochorie ?

C’est le transport « interne » d’une diaspore*, lorsqu’une graine est ingérée par un animal. Au fil du temps, certaines plantes ont développé des systèmes attractifs au profit d’une amélioration de cette dispersion. Ainsi, leurs fruits se chargent en sucres et se colorent au moment où ils sont mûrs, pour que leur consommation intervienne quand ils sont aptes à germer. Il y a certes des « consommateurs illégitimes » comme les guêpes, qui profitent du fruit sans bénéficier à la plante, ou des oiseaux qui écrasent graines et noyaux en les mangeant, comme le Grosbec casse-noyaux ou le Bouvreuil. Mais la plupart des espèces entretiennent avec ces plantes une relation symbiotique où le bénéfice est mutuel. L’énergie dépensée par la plante pour nourrir l’animal est récompensée par une dissémination. Les oiseaux sont d’importants agents de dispersion, mais c’est aussi le cas des mammifères. Le parfum et la couleur discrète de la mûre, par exemple, la prédestinent plutôt à ces derniers. Inversement, de petits fruits rouges en bout de branches en hauteur seront préférés des oiseaux.

Quelles sont les limites de l’endozoochorie par les oiseaux ?

La durée de parcours possible correspond au trajet de la graine durant la digestion jusqu’à son évacuation en fiente, ce qui équivaut à une trentaine de minutes pour un petit oiseau. Les scientifiques se sont rendu compte que dans les îles éloignées dans l’océan, peu d’essences sont disséminées de la sorte. Dans ce cas, c’est le transport externe, dit exozoochorie, qui entre en jeu : l’oiseau emporte accidentellement dans son plumage des graines dotées de divers systèmes adhésifs : crochets, poils, substance visqueuse… Ces graines peuvent parcourir plusieurs milliers de kilomètres avant la toilette, la mue, ou la mort de l’oiseau. Il s’agit d’une relation dite de « commensalisme », qui profite à l’un sans nuire à l’autre.

Qu’est-ce que la synzoochorie ?

La diaspore est alors activement emportée par l’animal pour être stockée et mangée ultérieurement. Un oiseau tel que le Geai des chênes constitue ainsi des réserves de glands qu’il enterre par paquets de six ou sept, formant plus d’une centaine de caches par individu chaque automne. Par oubli ou lorsqu’un oiseau meurt, certains glands ne sont pas consommés et se trouvent en parfaite position pour germer au printemps. Le Cassenoix moucheté procède de la même manière avec des graines de conifères, en particulier du Pin arol ou Pin des Alpes, qui colonise avec son aide les hautes altitudes. Noisettes ou faines de Hêtre sont aussi à son menu. Pour se prêter à cette dissémination, les fruits doivent à la fois être nourriciers et bien se conserve

Bernard FROCHOT, Ancien professeur d’écologie à l’Université de Bourgogne, Président d’honneur de Bourgogne-Franche-Comté Nature

En forêt, beaucoup d’espèces d’arbres se renouvellent ou voient leur front de colonisation progresser après une coupe grâce aux oiseaux. C’est aussi vrai pour les arbustes des haies. Il est facile d’observer combien ces essences parviennent rapidement à s’implanter dans des milieux ouverts laissés à l’abandon, comme dans d’anciens vergers. On peut remarquer la croissance d’essences qui ne sont parfois pas visibles directement aux alentours. L’étroite relation des plantes avec les oiseaux illustre à quel point les espèces ne peuvent être considérées isolément. Les écosystèmes forment un tout où se tissent des réseaux complexes de relations. La vie des plantes et leur maintien dépendent en partie des oiseaux, la diversité des unes n’allant pas sans la diversité des autres.

« Pour en savoir plus… »

Avec le n° 35 de la revue BFC NATURE, plongez-vous dans un dossier sur les plantes et leurs interactions avec les autres organismes vivants, notamment leur dissémination par les oiseaux. Un article paru dans cette même rubrique, Les ongulés, parsemeurs de graines, est aussi à retrouver sur https://bfcnature.fr/questions-de-nature-2022.

Mini-glossaire

Diaspore : élément permettant d’assurer la dissémination d’un végétal : fruit, graine.